Figure emblématique de la scène graffiti hexagonale dont la notoriété ne s’arrête pas à nos frontière, Poch, le graffiti artist installé à Rennes depuis quelques années, a accepté de se poser afin de répondre à nos questions.
Salut à toi, pour nos amis lecteurs qui ne te connaissent pas encore, peux tu te présenter brièvement ?
J’ai commencé par le pochoir en 1988. j’avais deja vu quelques pochoirs dans les rues de Meaux ainsi que dans d’autres villes. j’ai tout de suite été intéressé par ce médium. Lors d’un passage à Paris, j’ai trouvé le livre «Pochoirs à la une» aux éditions Parallèle et voila c’était parti… Dans ma cité je voyais aussi pas mal de graffiti comme les tags des UNITY FORCE BAND, DEVIL IN THE MIX… Je tombe alors à l’école sur un article dans le magazine ACTUEL sur le Hip Hop et tout le bas de l’article est illustré par des peintures des CTK… je me prends une claque. Avec deux bombes je fais ma première pièce l’été 89. En novembre de cette même année, je rencontre SHUN à un concert à Paris… on décide alors de s’associer pour peindre !
Quel est ton plus vieux souvenir lié au graffiti ? Qu’est ce qui t’a poussé à t’orienter vers cet art ?
Mon plus vieux souvenir doit remonter à 1986/87 où je vois des pochoirs dans les rues de St Malo pendant l’été. Le mouvement Punk Rock m’a beaucoup inspiré à cette époque et c’est de là que part mon engouement pour le pochoir.
Pendant qu’on y est, parle nous de ton pire souvenir, il y en a forcément au moins un…
Oui j’en ai un et tu le connais… Car tu étais présent. Un certain après-midi de 1994 dans un dépôt de trains d’une ville qu’on ne citera pas. Une bonne course poursuite digne d’un bon film de Belmondo…
Nous sommes parmi les premiers français à faire un interail avec Honet.
Tu as pas mal voyagé et j’imagine que les connections sont nombreuses. Qu’en as tu tiré?
je commence à voyager en 1992 avec Shun et en 1993, nous sommes parmi les premiers français à faire un interail avec Honet. On décide de partir tous les trois pour rencontrer d’autres graffeurs et se confronter ainsi à d’autres cultures… Cela a été très enrichissant. Les voyages continuent quand j’en ai l’occasion même si cela devient moins fréquent qu’auparavant. Un site est d’ailleurs consacré à ces voyages que nous faisons, il a été crée par Honet et 2SHY. Il est intéressant car il ne montre quasiment pas de graffiti mais plutôt l’atmosphère et l’ambiance ressentie dans chaque ville traversée. Voici l’adresse du site : http://milesunlimited.paris
Tu as la réputation d’être un peu touche à tout : graffiti, illustration, graphisme, production et maintenant édition. Comment t’organises tu?
Je fais avant tout les choses qui me plaisent. C’est un peu compliqué mais l’important est de faire ton travail avec passion. Je fais toujours du graffiti mais moins qu’avant, mon travail est plus axé depuis quelques années sur mes peintures liées au Punk Rock et à la musique. Dans mon processus de travail de plasticien, s’est ajoutée de façon logique, la création d’un label (Poch Records) pour sortir des disques qui n’avaient pas pu voir le jour à l’époque. Ensuite pour le livre «Bloody Belgium», je travaille sur ce projet depuis 2011. Suite à la première exposition Bloody Belgium à la galerie Hectoliter avec Elzo Durt à Bruxelles en 2011, je rencontre le photographe Luc Lacroix. Lors de mes recherches d’archives pour la réalisation de mes peintures pour cette exposition, je découvre son travail photographique qu’il a fait de 1977 à 1983, et là, je suis impressionné. De là part l’idée de réaliser un livre et de continuer le projet d’exposition «bloody Belgium» avec lui, malheureusement sans Elzo qui, surchargé de travail, doit abandonner le projet.
Le secteur de l’édition est réputé difficile, ça ne te fait pas peur?
Je ne me soucis pas trop de ça. Je veux que mon projet existe donc je le fais. C’est peut-être un peu casse-cou mais cela reste un essai, je ne vais pas faire une maison d’édition. Là dans le cas précis du livre «Bloody Belgium», je voulais rester maître de mon projet malgré les difficultés que cela engendrerait. Grâce au soutien logistique apporté par la maison d’édition L’Œil d’Horus / Wasted Talent, je ne vais pas trop à l’aveugle, je profite de leur expérience.
Tu aurais pu opter pour plus de pragmatisme (ou d’égocentrisme, c’est selon) en éditant un bouquin à ta gloire, cela ne t’as jamais tenté?
ça n’est pas forcement le propos, là ce qui me plait, c’est de mettre en lumière le travail de ce photographe (les photos dormaient dans son grenier depuis plus de 30 ans) et de le confronter à mes peintures. Mon travail existe aussi grâce à ses photos.
Je voulais rester maître de mon projet malgré les difficultés que cela engendrerait.
L’autre jour, on parlait de toi avec un pote et il disait que pour un punk, tu faisais du graffiti hip hop. Ce qu’il voulait dire (je pense) c’est que le graff est lié au hip hop et que les punks pour leur part, font des pochoirs ou des symboles anarchistes dans la rue. Que t’inspirent ce genre de clichés?
Je ne me considère absolument pas comme un punk, j’aime cette culture mais ma vie n’est pas celle d’un Punk. J’aime beaucoup d’autres choses… Pour moi le graffiti est bien plus qu’un attachement à une culture musicale, c’est un courant d’art à part entière et tu n’as pas besoin de revendiquer tel ou tel groupe pour en faire partie. Pour en revenir à la connection avec le Hip Hop, le Graffiti existe depuis 1967-68 bien avant l’émergence du rap et du breakdance.
On entend tout et son contraire concernant l’attitude des galeristes vis à vis des artistes urbains (pour ne pas dire street artists), j’aimerais avoir ton son de cloche.
Comme pour tout, il faut rester vigilant, il y a beaucoup d’arrivistes autant chez les galeries que chez les artistes. Cela reste un milieu difficile et compliqué que l’on commence à comprendre au fur et à mesure de nos erreurs. N’ayant pas de galerie qui me représente, tout cela reste un peu loin de moi pour l’instant.
Pour sortir son épingle du jeu, en plus d’être artiste, il faut être marqueteur aussi, non? Je constate que depuis quelques années certains utilisent le web à grand coup de buzz pour faire parler d’eux? T’en penses quoi?
Internet est un fabuleux outil de communication mais il ne faut pas tomber dans ses travers. Inonder les gens de spams ne me semble pas être une bonne technique à mes yeux même si elle a réussi à certains.
Bon, vu ton âge, tu ne dois pas forcément avoir d’idole dans le graff game, mais des artistes dont le travail te coupe les pattes, il y en a?
j’aime beaucoup le travail d’Aryz, Todd James aka Reas, Dem 189, les JBCB, 2shy, Honet, RCF1, L’outsider, Sobekcis et beaucoup d’autres…
Pour finir, comment te projettes tu dans l’avenir, j’imagine que tu as des projets plein la tête, dis nous tout?
Sur POCH Records, l’album du groupe MR HYDE est sorti en 2015, ils ont existé de 1979 à 1981 et se sont reformé pour une date unique à Saint-Malo, le 21 mars 2015. Je travaille pour 2016 sur d’autres sorties vinyliques comme le groupe HEB FRUEMAN.
Je m’occupe de la distribution et de la promotion du livre BLOODY BELGIUM qui est sorti début février 2015. Après Paris (Galerie du jour) et Liège (Galerie Central), l’exposition BLOODY BELGIUM se déplacera à BRUXELLES au PointCulture Bruxelles du 23 janvier au 27 février 2016. Le livre Bloody Belgium est disponible sur internet : bloody-belgium.com
Plus d’infos également sur : poch-records.com
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